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FORUM SOCIAL MONDIAL

Le nationalisme hindou, vecteur des violences religieuses, est vivement d?nonc?

Henri Tincq

Monday 19 January 2004, by TINCQ*Henri

Article paru dans Le Monde, ?dition en ligne du lundi 19 janvier 2003.

Bombay de notre envoy? sp?cial

Au-dessus d’un monceau de cadavres, un squelette s’adresse ? un autre : "Tu es musulman ? hindou ? chr?tien ?" Sur un panneau voisin, une arme est braqu?e contre un homme : hindou ou musulman ? Par l’humour, le Forum de Bombay exprime son indignation contre la violence religieuse et scande qu’"un autre monde, sans fondamentalisme, est possible". C’est l’aspect le plus subversif de ce premier Forum dans la poudri?re religieuse indienne.

A une tribune, se succ?dent des femmes de l’Etat du Gujarat, t?moins des massacres hindou-musulmans qui ont suivi la mise ? feu d’un train de voyageurs ? Godhra, le 27 f?vrier 2002. 2 200 morts en trois mois. Elles racontent la provocation des nationalistes hindous et la r?pression, sous l’?il complice des autorit?s : maris musulmans tu?s ? l’arme blanche, enfants battus, filles viol?es, familles chass?es (163 000), maisons pill?es.

Dans cet Etat, la tension reste ? fleur de peau. Les musulmans campent ? la fronti?re de l’Etat voisin de Bombay, jug? moins p?rilleux. Sheba, l’une des femmes du Gujarat, commente : "Les chr?tiens observent en silence. Ils savent que leur tour viendra."

Cette violence religieuse revient dans tous les d?bats de Bombay. Le nationalisme hindou, id?ologie du parti au pouvoir BJP, y est d?nonc? comme "n?ofasciste". "Elle est loin, l’Inde de Gandhi, de la non-violence et des spiritualit?s douces, cette Inde qui domine encore l’imaginaire occidental",explique Ruth Manorama, militante de la Marche des femmes. Ce que confirme un j?suite, C?dric Prakash, connu pour ses efforts aupr?s des marginalis?s : "C’est une violence structurelle propre ? une soci?t? divis?e en castes. Le fondamentalisme hindou utilise les dalits (les "intouchables"), les populations tribales et les minorit?s religieuses pour confirmer la supr?matie de la caste brahmanique. On assiste ? l’?mergence d’un v?ritable fascisme."

Comment en est-on arriv? l? ? "La non-violence de Gandhi, le combat la?que ont masqu? la mont?e d’un militantisme hindou qui impr?gne aujourd’hui tous les secteurs de la vie, fait pression sur les candidats aux ?lections, fomente des ?meutes religieuses", explique Mo?z Rasiwala. L’Arm?e de Shiva (Shiv Sena), l’extr?me droite hindoue, p?se sur la politique jusqu’? Bombay m?me. "Pr?tendre que l’Inde est unifi?e culturellement autour de l’hindouisme, c’est se moquer du monde, explique P. K. Murthy, l’un des organisateurs du Forum. L’Inde abrite toutes les religions. Les musulmans sont plus nombreux qu’au Pakistan." Fondatrice de Communalism Combat, mensuel de lutte contre le sectarisme religieux, Teesta Setalvad est de religion hindoue. Son mari est musulman et ils m?nent le m?me combat pour que justice soit faite deux ans apr?s les affrontements du Gujarat et r?tablie l’objectivit? dans les manuels d’histoire r?vis?s par les hindouistes. L’Occident doit ?tre conscient, souligne Teesta, que les ?v?nements du Gujarat n’ont ?t? qu’un "galop d’essai" et que cette chasse aux minorit?s de castes et de religion - musulmans, chr?tiens, juifs - ne fait que commencer dans une Inde qui risque d’exploser.

Jamais le nationalisme hindou n’avait ?t? ainsi mis en cause sur une sc?ne internationale. La d?nonciation du sectarisme et du syst?me des castes sera interpr?t?e apr?s Bombay comme une atteinte ? l’hindouisme m?me. Un pauvre peut devenir riche en Inde, mais un dalit restera toujours un dalit. C’est un syst?me social ancestral implacable, fig? depuis des si?cles par la religion. La conception hindoue de l’existence est fond?e sur le "Livre des comptes": l’homme est comptable dans cette vie des m?faits ou des bienfaits de sa vie ant?rieure.

"Que le syst?me des castes et la pauvret? de l’Inde soient d?nonc?s dans un forum mondial est insupportable aux militants nationalistes", commente le j?suite Manu Alfons. C’est en partie la crainte des organisations fondamentalistes qui explique la discr?tion des autres communaut?s et le silence de la hi?rarchie catholique. A Porto Alegre, celle-ci ?tait bien plac?e dans le comit? d’organisation par le biais de sa commission Justice et paix, dirig?e par le Br?silien Chico Whitaker, qui est encore l’une des vedettes de ce rassemblement indien.

Cette fois, l’archev?que de Bombay, le cardinal Ivan Dias, s’est fait porter absent. "On ne peut pas nier que les nationalistes hindous font pression sur toutes les Eglises, qui ont leurs sources de financement ? l’?tranger, explique Manu Alfons.Pour eux, le chr?tien sera toujours un ?tranger, comme le musulman toujours un Pakistanais."

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