P ?kin, Hongkong de nos correspondants
Les derni ?res illusions que les Hongkongais pouvaient nourrir sur les perspectives d’une d ?mocratisation de leur territoire viennent d’ ?tre cr ?ment dissip ?es. Dans une d ?claration qui marque un tournant sept ans apr ?s la r ?trocession de l’ex-colonie britannique ? la Chine, le comit ? permanent de l’Assembl ?e nationale populaire (ANP) du r ?gime chinois a r ?affirm ? de la mani ?re la plus explicite, mardi 6 avril ? P ?kin, le primat de l’autorit ? du gouvernement central dans toute r ?forme politique ? Hongkong.
Afin de d ?courager le mouvement d ?mocratique qui a multipli ? les manifestations locales depuis neuf mois, le comit ? permanent de l’ANP a jug ? utile de pr ?ciser son "interpr ?tation" d’articles de la Loi fondamentale de Hongkong pr ?voyant que le chef de l’ex ?cutif et le Conseil l ?gislatif seraient ?lus ? terme au suffrage universel.
Cette perspective n’ ?tant assortie d’aucun calendrier ni d’aucune modalit ? pratique, le mouvement d ?mocratique local se mobilisait pr ?cis ?ment pour que la r ?flexion s’engage sans tarder sur le d ?tail du processus devant conduire ? ce suffrage universel. Actuellement, le chef de l’ex ?cutif est appoint ? par un comit ? non repr ?sentatif et seuls 24 des 60 membres du Conseil l ?gislatif sont ?lus au suffrage universel.
Face ? cette pouss ?e du camp d ?mocrate, P ?kin r ?pond donc sous la forme d’un rappel solennel de sa supr ?matie. Selon la nouvelle "interpr ?tation" de la Loi fondamentale, le comit ? permanent de l’ANP sera habilit ? ? intervenir ? toutes les ?tapes de la proc ?dure de r ?vision du mode de scrutin pour l’ ?lection du chef de l’ex ?cutif comme pour celle du Conseil l ?gislatif. Il doit par exemple d ?cider "s’il y a un besoin" d’amender ce mode de scrutin et, bien s ?r, approuver le contenu de cette ?ventuelle r ?vision. La marge d’autonomie locale dans l’initiative de la r ?forme est donc r ?duite ? n ?ant.
"La Chine est un Etat unitaire, pr ?cise la d ?claration p ?kinoise, et non une f ?d ?ration. Les collectivit ?s locales n’ont donc aucun pouvoir de d ?cider par elles-m ?mes de changement constitutionnel." Voil ? qui fixe de mani ?re abrupte les limites du "haut degr ? d’autonomie" dont Hongkong ?tait cens ? b ?n ?ficier en vertu de la formule "Un pays, deux syst ?mes" qui a pr ?sid ? ? la r ?trocession de 1997.
Sur place, les Hongkongais ont r ?agi avec peu de surprise ? cette r ?affirmation de l’autorit ? centrale. Les commentaires confirment toutefois la cassure entre les diff ?rentes forces politiques du territoire. Pour le principal parti "pro-P ?kin", l’Alliance d ?mocratique pour l’am ?lioration de Hongkong (ou DAB), la d ?cision de P ?kin est "tr ?s mod ?r ?e" et "clarifie les choses". Pour le Parti d ?mocrate, formation la plus populaire ? Hongkong, c’est l’initiative d’"interpr ?ter" la Loi fondamentale qui est remise en cause.
"Le probl ?me n’est pas de savoir si -les membres du comit ? permanent de l’ANP- ont interpr ?t ? de fa ?on lib ?rale ou restrictive, critique Martin Lee, l’une des figures du Parti d ?mocrate. Le simple fait qu’ils aient interpr ?t ? montre tout l’arbitraire. Aujourd’hui, ils nous laissent quelques libert ?s mais la m ?thode avec laquelle ils proc ?dent montre qu’on n’a aucune garantie pour le futur." Les autres critiques portent sur l’incapacit ? des dirigeants de la R ?gion administrative sp ?ciale (RAS) de Hongkong ? d ?fendre l’autonomie locale.
Au sein du camp d ?mocrate, l’espoir d’obtenir le suffrage universel d ?s 2007 — la Loi fondamentale pr ?voit que la r ?forme peut commencer ? cette date — n’a pas disparu. La pression va d ?sormais s’exercer sur Tung Chee-hwa, le chef ex ?cutif, pour qu’il pr ?sente un "rapport" ? P ?kin sur la n ?cessit ? ?ventuelle de r ?viser le mode de scrutin — cette initiative est pr ?vue par l’"interpr ?tation" de P ?kin. En cas de refus oppos ? par Tung Chee-hwa, "les gens vont ? nouveau descendre dans la rue", avertit le tablo ?d Apple Daily, tr ?s engag ? dans le camp d ?mocrate.
La douche froide p ?kinoise a manifestement polaris ? davantage les opinions locales. Les scrutins de septembre, qui verront l’ ?lection directe de la moiti ? des si ?ges du Conseil l ?gislatif, diront si la population s’est laiss ? d ?courager par le diktat de P ?kin.